Découvrir l’église
Pour découvrir les richesses de l’église, la Sauvegarde a mis en place un parcours patrimonial en 8 étapes. dans l’église, chaque étape est matérialisée par un cartel portant un QR code de lien avec la description du lieu concerné. Retrouvez ces étapes en cliquant sur l’image ci-contre
Pour une découverte vidéo en 35 minutes, cliquez sur l’image. Cette vidéo est à jour des dernières réalisations de l’association pour mettre en valeur l’église et ses trésors
Les curiosités
L’église Saint-Laurent-des-Prés se caractérise par de nombreuses curiosités et questions non résolues. nous en présentons quelques unes….
- Les vitraux – un monstre dans la chapelle Notre-Dame-de-Pitié
- Pourquoi doit-on descendre pour entrer dans l’église ?
- La chapelle des Ursulines, maintenant chapelle de l’Ascension
Les vitraux – un monstre dans la chapelle Notre-Dame-de-Pitié
Comme dans toutes les églises, les vitraux de Saint-Laurent-des-Prés sont un témoin de son histoire.
La situation est critique en 1866, comme nous l’apprend le registre de la Fabrique : » antérieurement à l’année 1866, il n’existait point de vitraux dans l’église de Tullins. Les ouvertures anciennes se trouvaient toutes en partie murées vers leur base, et n’avaient d’autres vitrages que des châssis en bois ou en plomb garnis du verre le plus commun. On les a bien vite désobstrués pour leur rendre leur dimension primitive, et toutes les ouvertures au nombre de neuf ont reçu des vitraux grisaille de divers genres fournis par la maison Gubian et Roy-jeune, maîtres verriers à Lyon « .
En 1866, 8 vitraux ont été commandés : 2 dans le chœur, 4 dans la nef, et 2 dans les chapelles sud vraisemblablement ceux de la chapelle Saint-Joseph et de la chapelle du Sacré-Cœur.
La majorité de ces vitraux sont encore présents aujourd’hui, les seuls vitraux d’une facture différente et beaucoup plus colorés étant :
=> Le vitrail derrière le chœur, offert en 1867 par Mme Jeanne Véronique Perret et dont nous ignorons l’auteur.
=> Le vitrail de la chapelle de la Vierge, fabriqué en 1888 par Buche, maître verrier à Grenoble
=> Le vitrail de la chapelle du Sacré-Cœur, fabriqué en 1947, qui a remplacé l’un des vitraux en grisaille détruit par une explosion survenue dans le voisinage, fabriqué par Balmet, maître verrier à Grenoble.
=> Le vitrail de la chapelle des Capucins, chapelle qui devait être modifiée par la suite, mais a gardé finalement sa fonction d’accès au clocher et le vitrail de la chapelle Notre-Dame de Pitié, un vitrail simple en verre translucide ayant été conservé en 1866.
Anne Brugirard , maître verrier et patronne des ateliers Montfollet à Grenoble, qui est chargée de la remise en état des vitraux en 2025, nous indique : » Les vitraux en grisaille de 1866 sont caractéristiques de cette époque, où d’une part le renouveau religieux entrainait une forte demande en vitraux, mais d’autre part les moyens des fabriques étaient assez limités. Les maîtres verriers ont donc, à cette époque, cherché à faire des vitraux à la fois décoratifs et satisfaisants esthétiquement, mais plus économiques ; pour cela, ils employèrent deux techniques :
- D’une part l’utilisation de pochoirs, permettant un travail plus rapide que la peinture de sujets, ce qui explique les motifs répétitifs et géométriques de la majorité de ces vitraux,
- D’autre part l’utilisation d’un verre « à vitre » en lieu et place d’un verre à vitraux. Mais ce type de verre nécessitait ; pour que les couleurs soient fixées, une température de cuisson plus élevée, qui n’a pas toujours été appliquée.
En conséquence, les pigments sur ces vitraux sont mal fixés, et leur nettoyage doit se faire avec la plus grande prudence. Souvent, pour ne pas entacher leur réputation locale, les maîtres verriers de l’époque réservaient cette technique économique pour prendre des chantiers un peu loin de leur base, ce qui explique peut-être que le marché ait été passé à un lyonnais et non à un grenoblois. »
Naturellement, des entretiens périodiques des vitraux ont été entrepris au cours du temps depuis 1866, pour garder l’église hors d’eau, et combler les manques apparus peu à peu. Ces réparations ont été faites avec plus ou moins d’expertise professionnelle. On peut ainsi voir, dans un motif du vitrail de la chapelle Notre-Dame-de-Pitié, un motif végétal qui a été remplacé sans respecter ni la couleur ni le motif d’origine. Ce motif, en termes de verrier d’art, est appelé un monstre, et c’est ainsi qu’une erreur de réalisation nous permet de raconter l’histoire des vitraux et ses curiosités.
Pourquoi doit-on descendre pour entrer dans l’église ?
Lors de sa construction, le parvis de l’église était au niveau du sol de la nef. Ce qui est maintenant la place de l’église était donc à un niveau beaucoup plus bas. Des mangeoires pour animaux existent d’ailleurs encore dans les sous-sols de certaines maisons de la rue Bayard, sous-sols maintenant transformés en caves, ce qui corrobore cette hypothèse. Pendant sa construction et les siècles qui suivirent, le niveau relatif entre le sol de l’église et l e parvis a changé, ce qui explique qu’il faut maintenant descendre pour entrer dans l’église. Mais à quoi est dû de changement de niveau ?
Un tassement de l’église, qui se serait enfoncée dans le sol, pourrait être une hypothèse, mais on n’a observé aucun autre tassement dans le voisinage de l’église, et cette hypothèse ne peut être retenue
Un exhaussement du sol, dû au fait que l’église était entourée du cimetière, peut y avoir contribué, mais de manière très marginale.
Une autre explication, mais qui n’a été évoquée qu’une seule fois dans une thèse étudiante, serait que lors de la construction de la nef et du chœur au XVe siècle, les bénédictins auraient creusé le sol de la nef pour limiter le remblai à exécuter pour combler l’arrière des remparts nouvellement construits, mais cette explication ne nous parait guère raisonnable.
L’explication la plus vraisemblable est que les crues du Rival, torrent maintenant canalisé, charrièrent de grandes quantités de matériaux qui envahirent le parvis, le cimetière, et sans doute l’église elle-même. A l’époque, on s’est contenté d’évacuer les déblais de la nef ; et de faire un escalier permettant d’accéder à l’église. Jusqu’en 1866, cet escalier en bois de quatre marches était à l’intérieur de l’église, et le registre de la Fabrique nous informe de « plusieurs inconvénients à cette situation :
- Faire apparaitre l’église plus en contrebas qu’elle ne l’est réellement
- Restreindre son étendue de ce côté
- Exposer les fidèles aux bruits incessants des personnes montant et descendant ces escaliers, surtout pendant l’hiver
- Enfin de servir de station élevée à un grand nombre d’hommes qui s’y groupaient toujours de préférence sans se préoccuper de la gêne qu’ils apportaient à la circulation.
Le registre de la fabrique insiste sur le caractère provisoire de ces travaux de 1866, le Conseil de fabrique ayant toujours l’espoir qu’elles seront transportées plus extérieurement encore, à l’aide d’un abaissement de la place de l’église, et de la mise à exécution du projet de l’enceinte réservée devant cette façade, ce qui ferait disparaître le côté disgracieux et incommode de l’entrée actuelle. »
Comme on peut le constater, le provisoire dure toujours, son caractère incommode aussi, puisque l’accès aux personnes à mobilité réduite a dû être organisé par la porte nord de l’église.
La chapelle des Ursulines, maintenant chapelle de l’Ascension
La chapelle de l’Ascension est aussi appelée chapelle des Ursulines. Qui étaient-elles, et quel fut leur lien avec Tullins ?
Au départ, la compagnie de Sainte-Ursule fondée par Angèle Merici en 1539 est une famille de religieuses non cloitrées et n’ayant pas prononcé de vœu public. Ces sœurs ne vivent donc pas en communauté. Quatre ans après sa mort la compagnie est reconnue par le pape Paul III.
En 1572, le cardinal archevêque de Milan, saint Charles Borromée en modifie les institutions en soumettant les sœurs à la règle de Saint Augustin. Les sœurs prononcent désormais des vœux, se voient imposer la vie commune, et se soumettent à l’autorité épiscopale. Le nouvel ordre ainsi créé est officiellement reconnu par Grégoire XIII.
Les Ursulines arrivent à Tullins vers 1633, et s’établissent dans la maison Charpenay, sise rue du docteur Masson. En 1637, le seigneur de la Marcousse, qui gérait le prieuré bénédictin, estime qu’il conviendrait bien à des religieuses, et propose donc de « mettre et subroger en sa place » les Ursulines.
Le prieuré est en très mauvais état. Les Ursulines vont le rénover, et demandent à avoir accès à l’église par une ouverture pratiquée dans le chœur, pour pouvoir assister aux offices sans être mélangées aux laïcs. Un désaccord sur la prise en charge des travaux survient ; il s’en suit un procès qui durera 20 ans, et se terminera par une transaction amiable qui conduira à un échange entre la maison Charpenay et le prieuré, qui devient ainsi la propriété des Ursulines.
Celle-ci reçoivent l’autorisation de pratiquer l’ouverture demandée, qui sera fermée par une grille. On dit que le curé montait sur une échelle pour leur apporter la communion, mais nous n’avons pas trace de cet état de fait dans les documents que nous n’avons pu consulter, et nous n’avons pas retrouvé l’échelle…
En 1675, les Ursulines, qui se trouvent trop à l’étroit dans ce prieuré, vont acquérir le domaine de Cruzille, où elles aménageront une chapelle, puis un cimetière, et le prieuré est à nouveau pratiquement abandonné.
En 1773, La Fabrique décide de remplacer l’ancien autel en bois, qui était très vétuste, par un nouvel autel en marbre. Des plans sont établis, mais les finances sont insuffisantes, et l’on décide de construire un autel provisoire en bois et en brique. Le provisoire a un peu duré, puisque c’est cet autel que nous pouvons encore voir aujourd’hui.
Mais la somme à disposition de la Fabrique pour construire l’autel provisoire est encore insuffisante, et les quêtes organisées ne suffisent pas à rendre l’opération possible. La grille des Ursulines sera donc vendue et il faudra y ajouter la vente de six chandeliers et d’un crucifix d’argent pour financer le nouveau maître-autel.
L’ouverture dans le mur est alors comblée, mais on laisse subsister un petit fenestron, qui permet aujourd’hui d’avoir une vue plongeante sur le chœur depuis la chapelle.
Quant aux Ursulines, chassées de leur couvent de Cruzille par la Révolution en 1792 (elles étaient encore trente-six à cette date) elles reviennent à Tullins en 1819, et investissent le couvent Notre-Dame de Grâce de 1828 à 1903.
Suite à la loi de 1905 séparant les biens de l’église et de l’état, ce qui restait du prieuré, devenu le presbytère devient propriété de la commune. C’est toujours le cas en ce qui concerne l’église, mais le presbytère est vendu par adjudication. M. Pavin de Lafarge s’en porte acquéreur, et en sera le propriétaire jusqu’en 1927 environ, période pendant laquelle il en laissera la jouissance à la Paroisse, sans percevoir de loyer. Il revient ensuite à l’Association des Familles d’en assurer la gestion, comme elle le faisait des écoles libres et des activités culturelles et sportives de la paroisse. En 1951, l’Association des familles devient l’AEP, et se sépare progressivement de son patrimoine immobilier à partir de 1971.
Après le départ du dernier prêtre résident en 1987, la cure devient disponible pour les activités culturelles et religieuses. Les salles sont peu à peu aménagées pour cet usage.
En 1999, il est décidé de réaménager l’ancienne chapelle des Ursulines, qui avait été divisée en deux pièces, et dont les murs avaient été doublés de placoplâtre. C’est au cours de ces travaux que sont redécouverts d’une part le mur en briques qui a remplacé la grille en fer forgé, et la fresque peinte sur le mur ouest.
Après des siècles d’oubli, la chapelle est à nouveau consacrée fin mars 1999 par le père Renaud de Corcy, en présence de Robert Mazin, Paul Guely et Gilbert Veyret, très impliqués dans la mise en valeur du patrimoine tullinois, et de Sylvie Vincent représentant le département.
Elle porte désormais le nom de chapelle de l’Ascension, symbolisée par une sculpture en bois de Jean-Claude Delphin, bien que les bénévoles qui ont mené à bien cette restauration à l’époque aient trouvé dans ce nom un rappel des nombreuses marches à gravir pour l’atteindre.
A suivre…